Géorgie du Sud
Une destination extrême de part son éloignement, ses conditions climatiques et la densité de sa faune.
Située à plus de 1300 kilomètres des îles Malouines, l’exploration de cette île montagneuse de l’Atlantique Sud est marquée par les 50èmes hurlants et les vents catabatiques. La faune quant à elle n’en a que faire : la présence animale y est démesurée.
Une profusion de vie animale
La Géorgie du Sud est une île située au milieu de la convergence antarctique. Cet isolement et la rudesse de son climat ont permis de la préserver de l’influence humaine et de la conserver en tant que paradis pour faune.
Durant le pic de la saison reproductive (octobre-novembre) la concentration d’animaux sur certaines plages est la plus élevée du monde :
3 millions de couples de gorfous dorés (aussi connus sous le nom de manchots macaroni) 500 000 couples de manchots royaux, plus de 10 000 couples de manchots papous et bon nombre de manchots à jugulaire, de manchots Adélie et de gorfous sauteurs.
33 espèces d’oiseaux dont 1500 couples d’albatros hurleurs (20% de la population mondiale) et des pétrels antarctiques et géants.
2 millions de otaries a fourrure (soit 95% de la population mondiale), 400 000 éléphants de mer du sud (correspondant à la moitié de la population mondiale), des phoques de Weddell au langage si caractéristique, des léopards de mer et bien-sûr plusieurs espèces de baleines, des orques et des dauphins.
Entre le XIXe siècle et les premières décennies du XXe siècle, les baleines et les phoques ont été décimés pour leur peau et leur graisse. La plupart des espèces de baleines n’ont à ce jour toujours pas récupéré leur nombre de spécimens. En revanche les phoques à fourrure comptent aujourd’hui des millions d’individus, soit une population supérieure à la précédente.
Dans plusieurs régions de la côte niche tous les deux ans l’albatros errant et il ne vient à terre que pour ça. Le reste du temps est passé en mer, en vol ou en flottaison. Les oiseaux pélagiques comme lui utilisent les courants ascendants générés par les vagues pour rester en vol sans faire, presque jamais, l’effort de battre leurs ailes. Ce serait comme surfer sur l’air au-dessus des vagues. À sa taille, il n’y aurait aucun moyen d’obtenir l’énergie nécessaire pour passer la journée à voler d’une manière conventionnelle. Aujourd’hui les populations d’albatros sont en déclin en raison de la capture accidentelle par les bateaux de pêche.
La baie de Saint Andrews et la plaine de Salisbury hébergent les deux principales colonies de manchots royaux de l’île. Entre ces deux lieux se répartissent un demi-million de spécimens qui y pondent leurs œufs et élèvent leur progéniture. Ils ont une manière bien singulière de le faire : les poussins ne sont pas dispersés sur la plage mais par groupes de centaines ou de milliers. Les parents entrent dans le groupe et reconnaissent leur petit par son cri caractéristique. C’est incroyable parmi tant d’individus, mais tout compte fait, ils sont peut-être comme nous, capables de différencier un visage parmi des millions…
Sur le bord de la plage, près de l’eau, se trouvent d’innombrables phoques à fourrure et des éléphants de mer. Le phoque à fourrure n’est pas territorial dans l’eau mais il l’est sur la plage, et plus spécialement en décembre lors de la reproduction. Nous devons donc respecter quelques règles pour ne pas les déranger et aussi pour éviter d’être mordus. Le système hiérarchique de l’éléphant de mer, un mâle (> 3 tonnes) avec un harem de femelles, génère la convoitise des autres mâles qui essaient parfois de s’approcher d’une femelle. C’est alors que le mâle dominant surgit pour défendre son harem, s’engageant dans une bataille de titans violente et souvent sanglante.
De temps en temps, un élégant phoque léopard repose tranquillement sur la plage. Ceux-ci chassent les manchots, voire même certains bébés d’une autre espèce de phoque, mais la vérité est que leur alimentation se base sur une grande quantité de plancton. En ce qui concerne les baleines, les plus abondantes et visibles (en raison de leur comportement) sont les baleines à bosse, mais nous y rencontrons aussi des rorquals communs, des rorquals bleus, des baleines noires et plus encore.
Tout cela n’est qu’une très brève description de ce monde à part où nous pouvons contempler ces animaux dans leur environnement naturel. Venez voir par vous-même !
Haut lieu de la chasse à la baleine
Au début du XXe siècle, le norvégien Carl Anton Larsen établit la première usine baleinière de l’île dans la baie de Grytviken. L’huile produite par la cuisson de la graisse était très demandée. Elle servait de combustible pour les lampes à huile, et pour la fabrication de margarine et de savon. Le nombre de baleines était tel que dans les premières années, les chasseurs n’avaient que rarement besoin d’aller pêcher à l’extérieur de la baie.
Puis d’autres usines ont été établies sur l’île et la population de baleines a commencé à décliner.
Le danger et l’odeur de pourriture dans ces endroits n’étaient guère supportables pour les personnes non habituées. L’odeur était, selon Tim Flannery (On the Minds of the Whales, NYRB, février 2012) celle « de vapeurs putrides [semblables] au mélange de mauvais poissons pourris, de fumier et de l’odeur du tannage de peaux ». Et les dangers n’en étaient pas moins violents et originaux « Une baleine en décomposition pouvait se remplir de gaz jusqu’à l’éclatement, éjectant alors un fœtus de la taille d’un véhicule à moteur avec une force suffisante pour tuer un homme ».
A cette époque la baleine noire a été gravement décimée, puisque la qualité de son huile était meilleure et que cet animal restait immobile à la surface. Son nom, en anglais, vient de son aptitude à être chassé. Comme les efforts nécessaires pour chasser les baleines ont rapidement augmenté à cause de la surpêche, ils se sont mis à chasser les éléphants de mer, le combustible pouvant aussi être extrait de leur graisse.
Les usines disparaissaient à mesure que les ressources s’épuisaient, et aussi en raison de l’apparition sur le marché d’huiles dérivées du pétrole et des végétaux.
Aujourd’hui, les restes fantomatiques de ces lieux subsistent. Ces paysages de machines et d’instruments brisés rouillent et sont très lentement envahis par les mousses et les lichens. En raison des vents violents sur l’île, n’importe quel morceau de métal peut s’envoler à un certain moment et, pour des raisons de sécurité, il y a une interdiction d’approcher à moins de 200m des usines baleinières. Une exception est faite pour la base de Grytviken, faisant de ce lieu un paradis pour la photographie d’industries abandonnées et de textures diverses. Ce lieu abrite également une église luthérienne et un petit musée aussi complet qu’intéressant.
King Edward Point
Tout près de Grytviken se trouve une station de recherche permanente du British Antarctic Survey.
Cette colonie britannique constitue la capitale de la Géorgie du Sud et des îles Sandwich du Sud. Actuellement, douze membres du personnel du BAS passent l’hiver à la station, faisant de cet endroit la plus petite capitale du monde en terme de population.
Le principal domaine de recherche de cette équipe est la pêche durable et le suivi de certaines espèces qui peuplent l’île.
L’odyssée de Shackleton
L’île est également connue pour être l’endroit où Ernest Shackleton a terminé son incroyable exploit
Son navire se retrouva piégé dans la mer gelée de l’Antarctique (19 janvier 1915) et plus tard détruit par la glace. Ils réussirent à atteindre le continent de la péninsule antarctique (14 avril 1916) et de là, dans un petit bateau de soutien, lui et 5 membres de l’expédition naviguèrent 720 miles dans une zone de vents terribles jusqu’à ce qu’ils atteignent la Géorgie du Sud. Malheureusement, ils n’ont pu atteindre que la côte sud, où il n’y avait aucune usine ni aucune présence humaine. Pour cette raison, lui et deux autres durent traverser, sans équipement adapté, 50 km de l’une des zones de montagnes les plus difficiles au monde. Enfin, ils parvinrent à atteindre la base de Stromness (20 mai 1916), se sauvant et organisant le sauvetage des 24 personnes qui attendaient sur une île de la péninsule antarctique. Pas un seul homme n’est mort.
L’annonce publiée par Shackleton pour trouver un équipage pour son expédition avait parue dans le « Times » de Londres avant l’expédition. Voici ce qu’il y mentionnait :
« Hommes recherchés pour voyage dangereux. Petits salaires, froid amer, longs mois d’obscurité totale, danger constant, retour douteux. Honneur et reconnaissance en cas de succès. »
Il tint parole.
Shackleton mourut des années plus tard à Grytviken, juste avant son prochain voyage en Antarctique. Sa veuve voulait qu’il soit enterré au cimetière de Grytviken. Il est donc là, aujourd’hui, à côté de deux autres de ses compagnons d’aventure.
Vous souhaitez observer de gigantesques colonies d’animaux et découvrir l’histoire de cette île ?
Joignez-vous à nous !
Au mois d’octobre, nous partons des Malouines en direction de la Géorgie du Sud.